Lacs et phares abîment.

Sacré-Cœur, Paris, 16 décembre 2008.


Sacré-Cœur, Paris, 16 décembre 2008.

The Black AngelsVikings

C’était l’hiver sur Montmartre et il y avait trois personnages. Quatre, en comptant la masse de pierre glabre. Cinq, même, avec le fotoaparat qui avait accompagné le Poilu au sommet de la butte. Un fotoaparat neurasthénique, sa sangle penchait vers la retraite.

La masse de pierre glabre ressemblait à une glace d’arctique et dominait toute la surface de la place que le Japonais avait entrepris de photographier. Oui, sous la masse de pierre glabre, il y avait un Japonais, très quelconque, debout, l’appareil au bras. Il faisait face à sa douce, prête à sourire avec une millimétrique application et, à force de tâtonnements reptants, semblait avoir réussi à assembler jeune fille et vieil iceberg dans un seul cadre. Encore fallût-il tout exposer comme il eut fallu, voilà qui n’était pas gagné.

Ces supputations gambadaient sous la longue chevelure d’airain du Poilu, lui-même en pleine quête du bon angle, quand une paire de phares blancs vint envahir tout son viseur, le perturbant en pleine génuflexion cadreuse.

À cause des visages rieurs de l’escouade de policiers occupant l’estafette qui venait d’aborder la place, ou peut-être du léger bourdonnement qui couvrait légèrement son Nipode, le Poilu coupa sa bande-son. Le fourgon rallia au pas le fond de la place, y fit demi-tour et repassa le long de la masse de pierre glabre, haut-parleur branché, un sergent de ville jovial tenant son micro au milieu de sa troupe hilare, déclamant

« La Préfecture de Police,
La Mairie de Paris,
Se joignent à nous,
Pour vous souhaiter de bonnes fêtes de fin d’année.
 »

Regardant l’estafette s’éloigner, le Poilu ne put que conclure qu’il existait effectivement d’autres moyens de changer les policiers en fleurs que le Walther P38.